LES INONDATIONS À COTONOU, RÉPUBLIQUE DU BÉNIN.

 Université de Strasbourg

Faculté de Geographie


Marie Merveille ¹

Sanusi Ahmed ²




THEME : Les inondations à Cotonou (République du Bénin)

SOMMAIRE

Introduction 3

I- CONTEXTE TERRITORIAL AVANT LES CATASTROPHES 4

1.1. Présentation du milieu 4

1.2. Les ouvrages d’assainissements 7

II- SURVENANCE DES INONDATIONS 8

2.1. Causes potentielles des crues 8

2.2. Conséquences des inondations à Cotonou 10

2.3. Politique de gestion 11

III- PREVENTION ET GESTION DES RISQUES D’INONDATION 14

3.1. Mesures d’atténuation de la vulnérabilité 14

3.2. Pistes d’adaptation aux aléas de l’inondation 14

3.3. Renforcement de la résilience des populations 14

Conclusion 15

Annexes 16

Bibliographie 16










Introduction

Le phénomène d’inondation lors des précipitations est défini comme l’envahissement passager des lieux habituellement émergés par l’eau de pluie. Les inondations résultent de l’accumulation des eaux en raison de facteurs géomorphologiques, hydrologiques, topographiques, météorologiques ou anthropiques. Le risque d’inondation est intrinsèquement lié au lieu : certains espaces sont plus à risque que d’autres. L’aléa prend forme physiquement lorsque des inondations surviennent : il a une durée, une fréquence, une magnitude, une extension spatiale, etc. (Wallez, 2010) (Hountondji et al., 2019).

Le risque peut se définir comme la résultante du croisement entre aléa et vulnérabilité (Desbordes, 1997). Pour le risque d’inondation, l’aléa représente le phénomène naturel aléatoire traduit par le débordement de cours d’eau ou de canaux de drainage et l’extension de l’eau dans le champ d’inondation. La vulnérabilité transcrit quant à elle la sensibilité de l’occupation du sol et de la société au phénomène d’inondation (Pottier, 1998). Elle comprend intrinsèquement une notion d’acceptabilité, au sens socio-économique, des dommages potentiels encourus (Gendreau et al., 1998b) (Hountondji et al., 2019).

La ville de Cotonou est l’une des villes les plus arrosées du Bénin du fait qu’elle fait partie du cordon littoral (Gbaguidi, 2011). De ce fait elle est très exposée au phénomène d’inondation.

Quelles sont les causes et conséquences des inondations dans la ville de cotonou ? Quelles sont les stratégies d’adaptattion et d’atténuation à l’inondation ?

Dans les lignes à suivre nous allons dans un premier temps faire la présentation de la ville de Cotonou, ensuite nous montrerons les causes et conséquences des inondations et enfin nous proposerons des stratégies d’adaptation et d’atténuation.




I- CONTEXTE TERRITORIAL AVANT LES CATASTROPHES

1.1. Présentation du milieu

La commune de Cotonou est située sur le cordon littoral qui s’étend entre le lac Nokoué et l’Océan Atlantique, constitué de sables alluviaux d’environ cinq mètres de hauteur maximale. Elle représente la seule commune du département du Littoral et est une ville à statut particulière. Elle est limitée au nord par le lac Nokoué (85 Km2), au Sud par l'Océan Atlantique, à l’Ouest par les communes d’Abomey-Calavi, de So-Ava et à l’Est par la Commune de Sèmè-Podji. Elle est positionnée au croisement des parallèles 6°20’ et 6°24’ de latitude Nord et des méridiens 2°20’ et 2°29’ de longitude Est. La ville de Cotonou s’étend sur une superficie de 79 Km² (7900 ha) dont 35 % de zones marécageuses et 65 % de zones urbanisées de part et d’autre de l’Ouest du chenal (figure 1). Les quartiers de l’Est sont reliés à la partie Ouest par trois ponts. A l’Ouest de Cotonou, se trouvent le Port Autonome et l’Aéroport International qui font de la ville, la plus importante porte d’entrée et de sortie du Bénin, tandis que l’Est dispose d’une vaste zone industrielle. Administrativement, la ville compte treize (13) arrondissements et cent quarante-quatre (144) quartiers (Hountondji et al., 2019).

Figure 1 : Carte des sols et des sensibilités hydrologiques de Cotonou 

Source : Edéa (2010), Danvidé (2015)

  • Climat 

Le climat est de type équatorial avec une alternance de deux saisons pluvieuses et de deux saisons sèches : 

-une grande saison des pluies de mi- mars à mi- juillet, 

-une petite saison sèche de mi- juillet à mi- septembre, 

-une petite saison des pluies de mi- septembre à mi- novembre, 

-une grande saison sèche de mi- novembre à mi- mars. 

  • Précipitations 

Les précipitations ont lieu principalement entre mars et juillet avec un pic en juin (300 à 500 mm). Les températures moyennes mensuelles varient entre 27 et 31 degrés centigrades. Les écarts entre le mois le plus chaud et le mois le moins chaud ne dépassent pas 3,2 degrés à Cotonou, alors que cette variation se situe à 3,8 degrés dans le nord du pays. Les mois de février à Avril sont les mois les plus chauds et les mois de juillet à septembre sont les mois les plus frais. Pendant la crue caractérisée par la descente des eaux de septentrion et surtout pendant la grande saison des pluies, la ville est menacée par de graves inondations. Les épis du port ont contribué à l’érosion de toute la côte Est de la ville. Cette érosion s’opère à une vitesse moyenne de 16,80 mètres par an dans la crique (Hountondji et al, 2019).

  • Taux d’occupation des zones marécageuses

La figure 2 ci-après montre les zones marécageuses dans la ville de Cotonou.

Figure 2 : Etat des zones marécageuses à Cotonou en 2013 

Source : Fond (IGIP- Afrique, 2013), Traitement (Danvidé, 2015)

La ville de Cotonou est dominée par des sols hydro-morphes, ce qui explique sa sensibilité hydrologique. 

D’après la figure 2, on remarque une concentration des zones marécageuses principalement au nord avec les quartiers tels que Ahouansori-Agué, Zogbohouè, Avotrou qui sont potentiellement en contact avec le lac Nokoué donc plus exposés aux risques d’inondation. La partie ouest est plus marquée par la présence des marécages dans les quartiers de Agla, Casse auto, Gbèdégbé.

La façade nord de la ville de Cotonou présente plus de risques d’inondation que le côté ouest.

En réalité, les zones marécageuses n’étant pas appropriées à l’habitation, il est remarqué une installation tout à azimut des populations surtout à la périphérie de la ville.  

C’est ce qu’explique Danvidé (2015) par la forte concentration de l´occupation anarchique et spontanée des espaces périphériques de la ville ainsi que des marais (zones à priori inondables) conduisant à l´engorgement du lac Nokoué et rendant imperméable une grande partie des espaces par des constructions d´habitations et de routes. 

Selon Edéa (2014), la conséquence, déjà signalée dans d´autres centres urbains (Henderson-Sellers et Robinson, 1986) est une intensification des précipitations. Le réchauffement global de la planète, en tant que conséquence du changement climatique (Salomon et al 2007), modifie les facteurs climatiques régionaux et locaux et par la suite, agit sur les effets globaux, aboutissant aux risques climatiques. 

L’action combinée de tous ces facteurs anthropiques et techniques favorise la rétention de l´eau à la surface du sol (renforcement de l’imperméabilité) et provoque les inondations à Cotonou qui semblent s’aggraver d’année en année. 

Les facteurs de blocage de la circulation des eaux pluviales au niveau des marécages et exutoires sont : l'encombrement des couloirs de circulation des eaux par des habitations, le mauvais calibrage des ouvrages d'assainissement.

  • Evolution démographique

L’effectif de la population de Cotonou enregistré successivement au cours des quatre derniers Recensement Général de la Population et de l’Habitation (RGPH) est présenté par la figure 3 ci-dessous.

Figure 3 : Evolution démographique de 1973 à 2013

Source : INSAE Bénin, 2013

On note une croissance graduelle de la population au cours des quatre recensements. La population de Cotonou a donc augmenté de 358526 habitants depuis le premier recensement datant de 1979. Cette croissance démographique n’est pas sans conséquence sur le foncier à Cotonou et donc sur les superficies habitées prioritairement les zones inondables.

  • Risques d’inondation et zones à risques à Cotonou 

Le risque n’est donc pas un danger mais découle plutôt de la mise en relation entre la probabilité d’occurrence d’un événement et l’ampleur de ses conséquences éventuelles sur l’environnement. Au niveau du facteur spatial, les zones à risques sont vastes alors que celles où les catastrophes se produisent sont généralement plus localisables. Le risque est le produit d’un aléa par un enjeu (Alla Della, 2013), mais les définitions du risque quel que soit le contexte, privilégient de plus en plus le binôme « aléa-vulnérabilité » ou « aléa-enjeu » qui supposent tantôt une indépendance entre les termes ou qui est présenté tantôt comme une « rencontre », une « relation particulière », une « interaction », un « système de relations » (Pigeon, 2000).

La figure 4 présente les zones d’inondables qui varie en fonction du risque de l’étendue et du niveau.

Figure 4 : Zones à risque, étendues et limites des niveaux d’inondations à Cotonou 

Source : Edéa et Danvidé, 2014

Les quartiers périphériques au nord de la ville de Cotonou comme Vossa-Kpodji, Vossa, Ahouansori-Ague, Toweta, Adogleta, Hlakomè et Agbato sont plus exposés aux risques d’inondation à cause de leurs proximités par rapport au lac Nokoué. Ces quartiers constituent donc des zones potentiellement inondables où le risque est réel.

Ainsi, à partir du niveau 1,5 mètre à certains endroits de la ville, quelques rues sont partiellement submergées, de même que les infrastructures et les équipements. Les limites d’inondation de zones à risques peuvent être simulables à toute zone dont le niveau critique de hauteur des eaux se trouve dans un intervalle de variation de zéro à un mètre. 

La gestion des risques est liée à la gouvernance économique et à l'échelle de vulnérabilité des populations.

1.2. Les ouvrages d’assainissements 

En République du Bénin, seul le réseau d'évacuation d'eaux pluviales existe, donc il est construit en système unitaire. 

Les eaux usées sont soit jetées sur les cours, soit dans le réseau d'évacuation d’eaux pluviales. L'évacuation des excrétas se fait à l'aide des camions citernes, préalablement déposés dans des latrines (Yacoubou, 1984) cité par Danvidé, (2014).

La figure 5 suivante montre l'ensemble du réseau des collecteurs et des bassins de la ville de Cotonou.


Figure 5 : Réseaux des collecteurs et des bassins versants dans la ville de Cotonou 

Source : Danvidé, Mai 2014

Les collecteurs existants sont mal calibrés et mal entretenus. L’incivisme des populations empêche le bon fonctionnement des collecteurs d’eau car elles y jettent les ordures ménagères sans un tri préalable.

Les facteurs de blocage de la circulation des eaux pluviales au niveau des marécages et exutoires sont : l'encombrement des couloirs de circulation des eaux par des habitations et le mauvais calibrage des ouvrages d'assainissement. Ce qui occasionne un dysfonctionnement des collecteurs et des bassins versants. 

II- SURVENANCE DES INONDATIONS

2.1. Causes potentielles des crues

  • Causes naturelles des inondations à Cotonou 

Les causes naturelles des inondations à Cotonou, première ville économique du pays sont souvent discutées en quatre catégories à savoir : 

- la position géographique de la ville qui se trouve coincée entre l´Océan Atlantique et le lac Nokoué et subit de fait des influences du lac et de la marée océanique (la remontée des eaux du lac par les eaux marines pendant les hautes marées) ; 

- la pédologie de la ville qui montre une dominance des sols sablo-argileux ; 

- la géomorphologie de Cotonou qui met en évidence sa localisation sur la plaine côtière avec des pentes très faibles inférieures à 1% (Adam et Boko, 1993) ; 

- l´augmentation de la fréquence des évènements pluvieux extrêmes de 8% entre 1960 et 2000 (Edéa, 2000), et la diminution du nombre moyen de jours de pluie (CRED, 2010). 

Sur le plan hydrologique, Cotonou subit fortement les effets de la crue de l’Ouémé et du Lac Nokoué dont l’action aggrave les inondations dans certains quartiers comme Vossa, Fifadji, Ahouansori, Yénawa, Avotrou, Dandji, etc, proches du lac et du chenal (PDA-Cotonou, 2013). Ainsi, l’augmentation de la fréquence des inondations à Cotonou s’explique par l’augmentation de la fréquence des évènements pluvieux extrêmes. 

Il est à noter qu'en plus des problèmes d'inondation à Cotonou, la ville est confrontée aux problèmes environnementaux de l'érosion côtière. La situation de l'érosion côtière touche tout le littoral béninois depuis quelques années et crée d'énormes dégâts à Cotonou. Face à l'ampleur des dégâts, l’érosion côtière est devenue un phénomène de plus en plus préoccupant à la fois pour les populations des zones littorales à risques que pour les autorités de tous les niveaux. 

  • Causes anthropiques et techniques des inondations à Cotonou 

La ville a connu une croissance spatiale importante caractérisée par la construction d’habitat dans les zones marécageuses situées le long du lac Nokoué. La superficie des espaces bâtis est passée de 27,27% en 1963 à 82,44% en 2001 tandis que les zones marécageuses ont reculé de près 40% en passant de 51,5% à 10,87% (Edéa, 2014). L’augmentation des zones urbaines au détriment des surfaces occupées par les formations marécageuses figure ainsi parmi les changements spatiaux les plus significatifs. Par contre, déjà en 1994, les quartiers du centre-ville étaient pratiquement arrivés à saturation en termes de constructions (PDA61-Cotonou, 2013). Sur l’ensemble du territoire de la ville, seulement 13% des voies sont revêtues ; la construction des drainages routiers étant liée au revêtement des rues, l’extension de ceux-ci est encore limitée, avec 52 000 mètres environ pour les collecteurs primaires et 248 000 mètres linéaires pour les collecteurs secondaires (IGIP-Afrique, 2013). 

 Le tableau I ci-après présente une synthèse de ces causes anthropiques et techniques susceptibles d'être à la base de l'aggravation du phénomène des inondations à Cotonou.

Tableau I : Facteurs des inondations à Cotonou

Types 

Causes des inondations à Cotonou 

Anthropiques

Occupations non règlementaires de parcelles par des concessions en zones inondables

Manque d'entretien des ouvrages d'assainissement 

Evolution de l'occupation de la superficie des zones impropres à l'habitat par les concessions 

Obstruction des voix et canaux d'évacuation par les ordures ménagères 

Comblement du lac Nokoué réduisant ainsi sa capacité de rétention 

Techniques

Déficit d'équipements et ouvrages d'assainissement

Mauvais calibrage des ouvrages et la négligence des données techniques 

Qualité des constructions du au non-respect des normes urbanistiques 

Difficulté d'évacuation ou problème d'écoulement des eaux pluviales 

Source : Danvidé, 2015

  • Vulnérabilité des ménages aux inondations à Cotonou 

Déterminer la vulnérabilité d’une zone inondable suppose non seulement une caractérisation de l’occupation du sol, mais également le choisir et d’appliquer un mode d’estimation de la valeur des dommages comme l’évaluation financière, économique (Torterotot, 1993), (Debar et al. 1994) et l’évaluation par un indicateur physique comme dans la méthode inondable (Mate, 2001 et Gilard, 1998). 

La vulnérabilité se traduit par l’exposition des enjeux aux inondations. La caractéristique de la vulnérabilité réside dans sa relation directe avec la concentration de personnes, de biens, d’infrastructures et de moyens de production qui rend les villes particulièrement vulnérables aux aléas naturels (Bourrelier et al., 2000). 

La sensibilité hydrologique de la ville de Cotonou et son enclavement entre l’océan atlantique et le lac Nokoué, fait d’elle une ville aux réalités géographiquement vulnérables. Les enjeux pris en compte sont ceux caractérisables par télédétection comme les populations, l’habitat, la rue et les marécages etc. 

La figure 6 ci-après présente la carte géomorphologique et les zones de sensibilité hydrologique de la ville de Cotonou. Elle permet d'identifier les zones suivantes : le cordon littoral actuel et récent, la zone des berges lagunaires, lacustres et marécageuses, les plaines inondables basses, les bas-fonds argileux-sableux aquifère entre 0-20 mètres.

Figure 6 : Carte géomorphologique et zones de sensibilité hydrologique à Cotonou

Source : Fond de carte IGIP-Afrique, 2013, Traitement Danvidé (2015)

Les zones vulnérables aux inondations étant très importantes du point de vue spatial. 

Les habitants des berges lagunaires, lacustres et marécageuses (riverains du lac Nokoué) sont les plus touchés par le phénomène et subissent chaque année des inondations avec des niveaux de criticités différents. Les sinistrés riverains du lac représentent 68 % du nombre total de personnes touchées par les inondations sur l’ensemble du territoire communal de Cotonou.

2.2. Conséquences des inondations à Cotonou 

Les inondations engendrent beaucoup de conséquences sur l'environnement, entraînant de grandes pertes. Il existe trois principaux types de pertes identifiables : les dégâts matériels, les dégâts humains et la dégradation du paysage urbain.

Tableau II : Caractéristiques des dégâts matériels et humains des inondations à Cotonou

Dégâts

Conséquences

Matériels

Dégradation des habitations et autres biens personnels, des équipements de services urbains de base, des ouvrages d'assainissement, de la voirie 

Dégradation de points de commerce et d'activité génératrice de revenu 

Destruction des provisions alimentaires 

Inondations des parcelles de maraichage et la perte des produits de culture 

Dégradation des installations d'eau potable et d'électricité 

Humains

Perte de vie humaine : personne noyée ou emportée par les eaux, personne frappée par des décombres d'habitation ou autres objets 

Insolemment ou fragmentation des familles 

Personnes accidentées (blessures, fractures des membres, etc.)

Problèmes sanitaires (maladies, risques d'épidémie) 

Problèmes psychologiques des sinistrés à long terme 

Environnementaux et du paysage urbain

L’insalubrité et les difficultés de gestion des ordures ménagers 

Ruptures des ouvrages, destruction des infrastructures et équipements, la destruction des écoles, centres de santé, marchés, et autres services urbains de bases 

La dégradation du sol, la souillure des plans d’eau par toutes sortes de déchets et le risque de pollution des eaux de consommation 

La pollution microbiologique due aux rejets d'eaux usées dans les milieux aquatiques ainsi qu'au lessivage des sols qui apportent des quantités parfois importantes de bactéries d'origine fécale 

L’appauvrissement de la diversité biologique et la régression des habitats fauniques 

Les risques écologiques de pollution dus à toutes formes de contamination, lesquelles sont liées à la destruction d'installations industrielles et au déversement des produits chimiques 

Source : Danvidé, 2015

2.3. Politique de gestion

En situation de catastrophe, il n’existe pas un seul acteur concerné mais plutôt un ensemble d’acteurs appelés à une forme de solidarité dans l’appui technique et financier dans l’évacuation des sinistrés. L’objectif étant d’alléger les souffrances et de sauver les vies humaines en danger. Ce défi de gestion des catastrophes comme les inondations exige un objectif orienté vers des actions d’urgence avec une bonne appréciation de l’étendue des zones concernées, des dégâts et l’évacuation des sinistrés.

Gestion des inondations par les populations : entre stratégies et résilience

La gestion des inondations constitue pour les populations des enjeux d’adaptations majeures parce que l’on aboutit généralement à des situations de perte de biens matériels et à des problèmes sanitaires. Ces situations ont des impacts sur la situation économique précaire et l'environnement de vie des familles. 

Généralement, les quartiers nord de la ville situés non loin du lac Nokoué sont les premiers qui sont envahis par l'eau du lac due à la crue. A cela s'ajoute les quantités importantes d'eau pluviales. Face à ces situations, les ouvrages d'assainissement sont hors-services, ce qui ne permet plus l'évacuation des eaux. Dans les zones inondées, les infrastructures et équipements sont pour la plupart du temps difficilement accessibles.

Les populations développent elles-mêmes des stratégies d'adaptation et de gestion des inondations. Nous pouvons distinguer : les stratégies relatives aux déplacements des biens et des personnes et les stratégies relatives à l'utilisation des espaces d'habitation pendant la présence des eaux. 

- Stratégies relatives aux déplacements des biens et des personnes 

Pendant les périodes de présence abondante des eaux pluviales dans certains quartiers de la ville, les initiatives en matière de transport s'illustrent bien à travers les photos de la planche ….. ci-après.

 






Planche 1 : Départ et arrivée des passagers sur la voie pavée de Fifadji en pirogue 

Source : ONG CREDEL, Septembre 2010

Les emprises des rues bitumées, pavées et mêmes des rues carrossables se retrouvent partiellement ou totalement inondées. L'emprise des chaussées deviennent par excellence les couloirs de navigation des pirogues pour le transport des biens et des personnes. Habituellement opérationnelles pour les activités de pêches, les pirogues ont montré leur importance à Cotonou dans la stratégie des populations en matière de transport. Les propriétaires de pirogues saisissent l'opportunité d'une activité lucrative intéressante qui à notre avis, a aussi un caractère prioritairement humanitaire.

- Stratégies relatives à l'utilisation des espaces d'habitation pendant la présence des eaux 

La présence des eaux dans les concessions poussent les populations à l'utilisation des motos pompe quand le niveau de l'eau est relativement faible pour se débarrasser des eaux. En situation critique, les populations des ménages à faibles revenus qui n'ont pas de parents chez lesquels ils peuvent trouver refuge restent dans les habitations inondées. 

Ils s'adonnent à des pratiques ingénieuses en érigeant à l'intérieur des habitations des planchés de hauteur moyenne variant entre 1 et 1,50 mètre sous forme de pilotis. Ces planchés servent d'espaces de dortoirs pendant la nuit. Cet état de fait présente un risque majeur de santé et même de sécurité pour cette catégorie de population.

******Gestion institutionnelle des inondations : actions des organisations institutionnelles et de la mairie

Sur instructions du gouvernement, le plan ORSEC (Plan national d’Organisation de Secours) a été déclenché avec l’implication déterminée de la direction de la prévention et de la protection civile et de l’Agence Nationale de Protection Civile. 

Pour venir en aide aux populations sinistrées de Cotonou dans les premiers jours des dégâts causés par les inondations, les institutions communales, nationales et internationales, ainsi que les services de santé ont intervenu mais généralement en comité individuel en fonction des moyens disponibles. Les premières actions s’apparentant à des actions humanitaires se traduisent par des dons de denrées alimentaires, moustiquaires, médicaments et vêtements (LEDUR, 2010).

Face à cette situation de catastrophe, des interventions sont faites parfois par regroupement ou par alliance politique car les actions des autorités du pouvoir central et des collectivités décentralisées se font avec une coloration de bord politique. L’implication de la politique joue à la défaveur des populations et la coordination des actions est parfois entachée d’une lourdeur administrative. 

A Cotonou, l’État et la mairie ont mené des actions volontairement distinctes auprès des populations, parce que chacune a teinté d’une couleur politique (Wallez, 2010) ses actions sur le terrain. Il se cache dernière cette pratique, une idéologie de campagne politique pour se faire bonne foi auprès des sinistrés. 

Au niveau des actions coordonnées par OCHA-Bénin, les organisations humanitaires, y compris les agences des nations Unies et les ONGs, ont intervenu pour apporter l’aide aux populations sinistrées, notamment dans le domaine de la santé, des abris, de l’eau et de l’assainissement. Dans les zones sévèrement affectées, les risques de maladies étaient très élevés : les cas du choléra et de paludisme ont augmenté avec le retrait de l’eau des zones inondées.

Malgré l’amélioration des interventions des différents acteurs pour alléger les souffrances des sinistrés et réduire les pertes en vie humaines, des insuffisances ont pu caractériser la mise en œuvre de cette réponse aux inondations.

Initiée en 2003, la politique communale dénommé « Cotonou en Campagne Contre des Inondations » (3CI), consiste à faciliter l’accès des populations aux lieux publics (école, marché, centre de santé, etc.), à porter une assistance aux personnes en situation catastrophique avec l’aide des structures publiques (Sapeurs-Pompiers et ou des Assistants Sociaux). La politique de 3CI se contente donc de pomper localement des eaux des lieux publics inondés et les rejette dans les bas-fonds environnants. Une manière de déplacer le problème sans se soucier des dégâts que cela peut causer ailleurs. En plus de l’action des motos pompes, il faut souligner les activités de dépôt de matériaux (sable de remblai latéritique) pour assécher ou combler les points inondés des voies ou espaces publics.

Dans la pratique, les méthodes actuelles de lutte contre les inondations à Cotonou sont peu efficaces et ne permettent pas de résoudre les problèmes. Le coût onéreux de l’utilisation périodique et continue des engins mécanisés ne fait qu’augmenter la dette de la ville vis-à-vis des populations.

A Cotonou, dans les zones urbanisées ou non urbanisées, la problématique des inondations s’explique par l’insuffisance d’infrastructure d’assainissement, de plan d’assainissement cohérent et fonctionnel, et l’occupation des exutoires naturels de l’eau.

III- PREVENTION ET GESTION DES RISQUES D’INONDATION

L'importance des dégâts matériels et des problèmes exige une meilleure compréhension de la gestion des inondations afin d'aboutir à des stratégies pouvant réduire de façon substantielle les conséquences des inondations sur les populations.

3.1. Mesures d’atténuation de la vulnérabilité

La réduction des risques de catastrophe (RRC) consiste grâce à :

  • des efforts pour analyser et gérer les causes des catastrophes, 

  • une réduction de l’exposition aux risques, qui permet de réduire la vulnérabilité des personnes et des biens, 

  • la gestion rationnelle des terres et de l’environnement et l’amélioration de la préparation aux événements indésirables. 

La mise en œuvre d’une préparation systématique régulière devrait donc être adoptée et institutionnalisée. Le renforcement de la mise en œuvre du relèvement, incluant le système d’évaluation des besoins post-urgence semble nécessaire. Il comprendrait notamment le renforcement des capacités des parties prenantes en matière d’évaluation des besoins post-urgence et d’évaluation économique des dégâts et besoins post-catastrophes, ainsi que pour la planification et la mise en œuvre de leurs résultats. Cela contribuerait à assurer un relèvement socio-économique adéquat dans les zones affectées pour éviter l’accroissement de la vulnérabilité à cause des effets cumulatifs des catastrophes successives.

3.2. Pistes d’adaptation aux aléas de l’inondation

Au Bénin, les caractéristiques socio-économiques telles que la pauvreté, la mauvaise gouvernance ou les échelles numériques de croissance urbaine sont entre autres des facteurs de vulnérabilité. En dehors de ces facteurs, les populations situées dans des milieux vulnérables économiquement et écologiquement subissent les dangers et aléas climatiques. 

Les solutions stratégiques élaborées prennent en compte plusieurs aspects : les aspects urbanistiques, environnementaux, économiques et sociaux. 

A Cotonou, l’occupation par les populations des zones potentiellement inondables, la qualité des ouvrages d’assainissement et la capacité des autorités sont entre autres des éléments pouvant expliquer la difficulté à conduire une véritable politique de développement urbain. Dans le souci d’intégrer des propositions pouvant contribuer aux questions de gouvernance et de politiques de planification, il est nécessaire d’apporter :

- un appui à l’amélioration de l’urbanisme, de l’assainissement et de la gestion des déchets solides (de la pré-collecte, de la collecte, du transfert et du dépôt final) des services en charge des questions d’urbanisme, d’assainissement et de l’épineuse situation des déchets solides ; 

- une assistance technique et le renforcement des capacités des structures publiques et privées opérationnelles dans la conduite des différentes politiques de développement urbain ; 

- un renforcement des capacités institutionnelles en vue de remédier aux changements climatiques et d’assurer la gestion efficiente des risques liés aux catastrophes et aléas.

3.3. Renforcement de la résilience des populations

Au Bénin, il existe plusieurs Systèmes d’Alerte Précoce. Entre autres, nous pouvons citer : 

- le SAP en cas de catastrophes liées à des aléas hydro climatiques ; 

- le SAP sur l’observation de l’évolution des prix des denrées agricoles sur le marché (CT-SAGSA, ex ONASA) ; 

- le système de surveillance épidémiologique (Ministère de la Santé), etc. 

Dans le cadre de la formulation de la Stratégie Nationale de RRC au Bénin, il sera plus question de mettre le focus sur le SAP en cas de catastrophes liées à des aléas hydro climatiques. L’Agence Nationale de Protection Civile (ANPC) a en charge la coordination des actions de réduction des risques de catastrophe au Bénin. En cela, elle assure le secrétariat permanent de la plateforme nationale. Elle est chargée de la communication et de la diffusion de l’information produite par les fournisseurs de services climatiques à travers le Mode Opératoire Normalisé (MON). Celui-ci a été conjointement mis en place par les membres de la plateforme nationale RRC/ACC du niveau national à l’échelle communautaire. Le MON a été institué par arrêté en 2014 et a pour fonction : 

  • d’assurer l'échange d'information et la large diffusion en temps réel des alertes relatives aux aléas hydro climatiques reçues des structures nationales en charge de la production d'alertes, sous formes appropriées, notamment auprès des populations, des décideurs publics et des partenaires techniques et financiers ; 

  • de faciliter l'acheminement de l’information vers les populations des communes concernées en temps réel afin qu'elles puissent se préparer avant l'arrivée d’une catastrophe ; 

  • de suivre et d’animer toutes les activités d'alertes précoces afin d'éliminer ou de réduire les risques de catastrophes dans les domaines hydro climatiques. 



Conclusion

La maîtrise des risques d'inondation à Cotonou est une question qui devrait intéresser tous les acteurs du développement urbain. Les problèmes d'inondations à Cotonou sont à la fois liés à des facteurs climatiques et humains, et les niveaux d'exposition varient d'un quartier à l'autre. Dans les quartiers inondables, on peut identifier deux types d'initiatives de gestion à savoir les initiatives développées par les autorités publiques et les initiatives individuelles des populations. 

S'agissant des outils et stratégies politiques régionales en matière de climat et de gestion d'environnement, leur mise en œuvre effective appelle à la mobilisation des ressources financières conséquentes et à la constitution d'un capital humain qualifié. La qualité de vie en milieu urbain et l'implication des acteurs exigent une meilleure planification du développement et une efficacité du dialogue social. Pour lutter efficacement contre les inondations à Cotonou, il est indispensable d'améliorer la gestion actuelle par l'identification des mesures adéquates et une capitalisation des bonnes pratiques des expériences antérieures. A cela s'ajoutent la mise en oeuvre de mesures préventives et une réinsertion des ménages sinistrés qui sont généralement des populations à faibles revenus.





Annexe




BIBLIOGRAPHIE


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